GARDEZ-MOI
(P. Dudan/P. Dudan)

Dans quinze ans, dans vingt ans, ma mère,
II y aura plus d'un milliard de Chinois.
Dans quinze ans, dans vingt ans, ma mère,
Nul ne comprendra l' pourquoi du pourquoi.
Dans quinze ans, dans vingt ans, ma mère,
Je serai tout bête et tout maladroit.
Les Terriens n'auront rien à faire
D'un enfant naïf et vieux comme moi…

Gardez-moi quelque part une clairière,
Au soleil, comme au bon temps passé…
Gardez-moi dans le cœur une prière
Que je redirai sans presque y penser…
Gardez-moi le sourire de ma mère
Pour veiller sur mon sommeil d'enfant.
Sur mes mains, un rayon de lumière…
Dans mon cœur, un éternel printemps.

Je n'veux pas aller dans la lune.
Fuir dans une fusée mes cinq continents.
Je n'veux pas — suprême infortune —
De guerre atomique, de course au néant…
Qu'on me laisse un arpent de terre
Où je creuserai de profonds sillons,
Une source où se désaltèrent
Des lapins, des merles et des papillons…

Gardez-moi… un ami bien fidèle,
Le babil confiant d'un enfant,
Sous mon toit, un doux nid d'hirondelle…
Au bord d'un étang, une biche et son faon…
Gardez-moi chansons et fleurs nouvelles…
Gardez-moi mon jardin potager…
Un bon vin servi sous la tonnelle…
Et l'amour pour toujours partagé… (bis)